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Donations et successions

Preuve du quasi-usufruit pour la déduction de la créance de restitution en faveur du nu-propriétaire

Selon que le quasi-usufruit trouve sa source dans la loi ou dans une convention, la prise en compte de la dette va s’opérer de manière différente, ainsi que le rappelle la Cour de cassation dans une affaire de démembrement portant sur un portefeuille de valeurs mobilières.

Rappel sur le quasi-usufruit

Le quasi-usufruit constitue une forme particulière du démembrement de propriété.

Le quasi-usufruitier dispose de la jouissance du bien mais aussi de la faculté de disposer du bien grevé et d’en altérer la substance (« l’abusus »). Toutefois, ce droit temporaire est limité par l’obligation de restituer, à la fin de l’usufruit, des choses de même quantité et qualité ou leur valeur estimée à la date de restitution.

Ainsi, le nu-propriétaire dépossédé de l’abusus pendant la durée du démembrement dispose, à l’extinction de l’usufruit, d’un droit de créance dont le montant est égal à la valeur du capital soumis au démembrement de propriété.

Selon que le quasi-usufruit trouve sa source dans la loi (quasi-usufruit légal) ou dans une convention (quasi-usufruit conventionnel), la prise en compte de cette créance de restitution au passif de la succession du quasi-usufruitier va s’opérer de manière différente au plan fiscal.

Quasi-usufruit légal et déductibilité de la créance de restitution en faveur du nu-propriétaire

Le quasi-usufruit légal porte uniquement sur des choses dont on ne peut pas faire usage sans les consommer comme les sommes d’argent (c. civ. art. 587).

Pour les successions ouvertes depuis le 29 décembre 2023, les dettes de restitution exigibles afférentes à une somme d’argent dont le défunt s’était réservé l’usufruit ne sont pas déductibles de l’actif successoral (CGI art. 774 bis, I. al.1 ; BOFiP-ENR-DMTG-10-40-20-20-§ 210-26/09/2024 ; voir FH 4058, §§ 1-5 à 8).

Il en va toutefois autrement des dettes de restitution qui résultent de l’usufruit légal ou conventionnel du conjoint survivant qui restent déductibles de plein droit de l’actif successoral du quasi-usufruitier (CGI art. 774 bis, I. al. 2).

Ainsi, lorsque l’usufruit est d’origine légale, la dette de restitution trouve également son origine dans la loi (cass. com. 27 mai 2015, n° 14-16246).

Quasi-usufruit conventionnel de déductibilité de la créance de restitution en faveur du nu-propriétaire

Pour les choses non consomptibles mais fongibles, comme les valeurs mobilières cotées, la doctrine et les tribunaux admettent que le quasi-usufruit puisse être mis en œuvre volontairement (quasi-usufruit conventionnel) au lieu et place d’un démembrement classique.

Si le dispositif anti-abus de l’article 774 bis du CGI ne vise pas les dettes afférentes à un bien autre qu’une somme d’argent (BOFiP-ENR-DMTG-10-40-20-20-§ 210-26/09/2024), la Cour de cassation vient de rappeler quelles étaient les conditions de déduction de la créance consécutive à un quasi-usufruit conventionnel.

En l’espèce, au décès de leur père survenu en 2016, les enfants avaient déduit de l’actif successoral la somme de 168 109 € au titre d’une créance de restitution représentative des sommes et éléments figurant sur les comptes bancaires au jour du prédécès de leur mère survenu en 2007, parmi lesquels plusieurs comptes titres, dont leur père s’était vu attribuer l’usufruit et eux la nue-propriété.

Considérant que les comptes titres figurant à l’actif de la succession de la mère prédécédée en 2007 n’avaient pas fait l’objet d’une convention de quasi-usufruit notariée ou enregistrée conformément à l’article 773,2 du CGI, l’administration a remis en cause la déduction de la créance de restitution.

S’en est suivi un contentieux.

En appel, les juges ont prononcé le dégrèvement total de l’imposition supplémentaire mise à la charge des enfants estimant que la déclaration de succession du père faisant apparaître le montant des valeurs mobilières présentes au jour de son décès et dont le montant n’était pas contesté par l’administration fiscale, était suffisante à autoriser la déduction de la créance de restitution à cette date.

La Cour de cassation casse et annule l’arrêt d’appel.

S’agissant d’un usufruit portant sur un portefeuille de valeurs mobilières, la déclaration de succession, identifiant et renseignant exactement le montant des valeurs mobilières au jour du décès, ne peut établir, à elle seule, le caractère certain de la dette de restitution consécutive à la disparition, constatée à la fin de l’usufruit, du portefeuille de valeurs mobilières et en permettre la déduction conformément à l’article 768 du CGI.

En effet, s’agissant d’un quasi-usufruit conventionnel qui ne se présume pas, il doit faire l’objet d’une convention écrite, ayant date certaine lorsque le créancier est un héritier (par acte authentique ou acte sous seing privé dûment enregistré), pour permettre la déduction de la créance de restitution correspondante.

Pour aller plus loin :

« Donations - successions », RF 2023-6, § 4128

Cass. com. 27 novembre 2024, n° 23-12151

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